FARMAN 1914 La grande famille Deux frères d'origine anglaise, mais établis en France, Henry et Maurice Farman ont donné leur nom à toute une famille d'aéroplanes durant la seconde décennie de ce siècle. Ils figurent parmi les grands précurseurs de l'industrie aéronautique. Henry commença sa carrière en achetant un des premiers biplans Voisin et en le modifiant très sensiblement pour en améliorer l'aérodynamique et la maniabilité. A son bord, il effectua un certain nombre de « premières r, comme le premier vol circulaire sur 1 km le 13 janvier 1908 et, en octobre de la même année, le premier vol en rase campagne, de Châlons à Reims, soit une distance de 26,4 km. Henry Farman construisit son premier aéroplane en 1910. Ce fut un beau succès commercial sur le marché intérieur comme à l'exportation, en Angleterre et en Italie notamment, où il équipa les premières écoles de pilotage. II fut aussi fabriqué sous licence à l'étranger, en particulier par la firme allemande Albatros qui le construisit en grande série. Maurice Farman réalisa ses propres modèles jusqu'en 1912. Cette année-là, les deux frères commencèrent à unifier leurs produits avec, pour objectif, la fabrication d'aéroplanes portant la simple dénomination de Farman. Les ateliers de la « Société Henry et Maurice Farman » étaient implantés à Billancourt. Le point de vue technique II est difficile de distinguer les multiples variantes et sous-variantes des premiers modèles des Farman, chacun se distinguant des autres par de nombreux détails, comme le nombre des gouvernes, l'envergure relative des ailes supérieure et inférieure, l'agencement du poste de pilotage, le type du moteur, etc. Ainsi l'Henry Farman 1912 avait-il un moteur Gnôme de 60 cv, une envergure de 14,40 m et une longueur de 13,80 m. Le Maurice Farman de la même année avait 15,50 m d'envergure, 12 m de long et un moteur Renault de 70 cv. En simplifiant les choses, on peut caractériser comme suit les 3 modèles généralement classés sous l'appellation de Farman 1914 c'étaient tous des biplans, avec l'aile supérieure généralement plus grande que l'autre (formule sesquiplan). L'aile inférieure était constituée de 3 sections rendues solidaires par des goupilles à tringle de sûreté. Les deux plans étaient reliés par des entretoises en bois (du frêne en général) et par des raidisseurs en câble d'acier. La même technique était utilisée pour l'empennage. Le fuselage, à clairevoie, comportait un bâti de quatre longerons principaux partant des ailes et qui supportaient l'empennage arrière. Les croisillons étaient formés d'entretoises et de raidisseurs. A la partie inférieure de la queue était fixée une béquille d'acier destinée à freiner la course à l'atterrissage. Les ailes étaient munies d'ailerons. L'empennage horizontal demeura biplan (avec une gouverne mobile à la partie supérieure) jusqu'en 1912 sur les Henry Farman et jusqu'au MF 7 pour les Maurice Farman. Sur les modèles postérieurs, l'ensemble stabilisateur/ gouverne de profondeur devint monoplan. Les tous premiers exemplaires construits furent dotés d'un plan fixe horizontal qui dépassait vers l'avant le bord d'attaque des gouvernes de direction. Le train d'atterrissage se composait de deux jumelages de roues caoutchoutées à suspension élastique. Les patins des modèles antérieurs se retrouvaient sur quelques « type 1914 », surtout chez Maurice Farman, mais ils disparurent définitivement avec l'« Horace » Farman. La carlingue logée entre les deux plans et légèrement décalée vers l'avant, pouvait loger deux hommes, exceptionnellement trois. Le moteur était situé sur son arrière. Il entraînait une hélice bipale propulsive en noyer avec revêtement de cuivre sur le bord d'attaque. Comme sur tous les avions de l'époque, les instruments de bord étaient plus que rudimentaires : un altimètre, une montre et un manomètre. Il y avait aussi une pompe à air pour augmenter la pression dans le réservoir d'essence en cas de nécessité. Quant au moteur dont furent dotés les Farman, il y en eut de nombreux modèles dont la puissance évolua des 50 à 60 cv des Gnôme du début aux 135-140 cv du Salmson, en passant par les Renault, les De Dion Bouton, le Rolls-Royce Hawk, le Curtiss OX-5 sur certaines versions anglaises et le Fiat A-10 de 100 cv. Sur certains « Horace » Farman, il fut même monté des moteurs Renault de 170 cv (F 56) et 190 cv (F 60 et 61), soit près de quatre fois la puissance installée sur les ancêtres de la famille. L'utilisation La réputation de sécurité, de capacité d'emport et de visibilité totale, méritée par les Farman tant au cours des manceuvres qu'en école de pilotage, les firent adopter par de nombreuses aviations militaires. A ce titre, ils participèrent aux premières opérations aériennes de l'Histoire, sous les couleurs italiennes en Libye dès 1912. Il y eut jusqu'à 6 Henry Farman à moteur Gnôme de 50 cv, aux côtés de Blériot XI, dans les escadrilles de Tripoli, de Benghasi et de Tobrouk. Une patrouille composée d'un Farman et d'un Blériot effectua la première mission de nuit en zone opérationnelle, et le 31 janvier 1912, l'histoire de l'aviation militaire enregistrait son premier mort au Champ d'Honneur, le Capitaine Montù, atteint par un tir de mousquetterie, lors d'une mission de reconnaissance. Les Farman des divers modèles participèrent aussi, sous les couleurs françaises et espagnoles, aux opérations de pacification en Afrique du Nord de 1912 à 1914, et à la guerre des Balkans de 1913. Au cours de cette dernière, un MF 7 à flotteurs de l'aviation grecque attaqua des navires turcs à la grenade. Pendant la Grande Guerre, les Farman 1914 et les suivants furent utilisés sur tous les fronts, jusqu'en extrême-Orient où les Japonais effectuèrent à l'automne 1914 une des premières tentatives d'interception aérienne contre un Taube de la garnison allemande de Tsing-Tao. Les Anglais et les Belges les utilisèrent beaucoup pour des opérations aéronavales - deux sous-marins détruits par des bombes de 30 kg - et pour le bombardement de jour comme de nuit, avec notamment pour objectifs des bases de dirigeables - la destruction du Zeppelin L.Z. 38 sur la base d'Evère a été attribuée à un Farman du squadron Wing n° l qui largua 4 bombes de 10 kg. Sous les couleurs françaises ou britanniques, les Farman ont participé aux campagnes des Dardannelles, de Macédoine, d'Afrique centrale et de Mésopotamie et, bien entendu, aux opérations sur le front occidental. La plus lourde des bombes d'avion fabriquées à cette époque, 250 kg, fut larguée sur un campement turc, le 18 décembre 1915, par un F 27, le dernier né de la famille. Quant au F 30, entré en service en 1915, il servit surtout en Russie où il fut produit sous licence avec un moteur Salmson de 130 cv. Le F 40, celui dont la production fut la plus importante, servit principalement dans l'aviation française qui l'utilisa jusqu'en 1917 et en céda quelques exemplaires aux Belges et au RNAS britannique. La carrière opérationnelle des aéroplanes des frères Farman a donc été plus qu'honorable, mais elle fut relativement brève, pour les missions de première ligne surtout. A la suite des Français, les Italiens ne tardèrent pas à les retirer du front lorsqu'ils se révélèrent irrémédiablement surclassés. Ils continuèrent toutefois à servir en Libye jusqu'en 1922. |
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