René Caudron
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René Caudron
DU BIPLAN AUX PLUS FINS DES «RACERS»
Caudron parvint à allier les performances à l'économie et apporta une immense contribution au développement d'une aviation légère, sportive et commerciale.
L'histoire des avions Caudron débute en août 1908 à Romiotte, près de Rue (Somme), lorsque les frères Caudron Gaston (1882-1915) et René (1884-1959), des fils d'agriculteurs , qui s'étaient beaucoup intéressés aux démonstrations des frères Wright à La Hunaudière, entreprirent la construction de leur premier appareil.
Plus technicien que René, Gaston avait esquissé les plans de l'avion, laissant à son frère le soin de s'occuper des questions pratiques. Assistés du menuisier Victor Godefroy, ils terminèrent l'appareil en quelques semaines. C'était un grand biplan biplace de 60 m2 de surface portante, prévu pour recevoir deux moteurs Farcot de 30 ch. La construction utilisait le bois et le papier parchemin, qui fut remplacé plus tard par la toile caoutchoutée.
Le Caudron G-Ill (F-SYL) pièce maîtresse de écurie › de Jean Salis photographié au roulage en juin 1976 lors du meeting annuel des vieux avions qui se tient à La Ferté-Alais. |
Faute de pouvoir disposer rapidement de moteurs, les frères Caudron décidèrent d'utiliser la machine, désignée Caudron type A, comme planeur. Les premiers décollages eurent lieu en 1909. Traîné par leur jument préférée, Luciole — au demeurant championne de trot —, et piloté par René, l'appareil atteignit rapidement 10 m à 15 m d'altitude, à la grande surprise des curieux venus assister à ces expériences. Les constructeurs cassaient souvent du bois, mais ne se décourageaient pas, travaillant toute la nuit à remettre leur machine en état pour le lendemain.
Au début de 1909, ils firent l'acquisition d'un moteur. Mais la puissance de ce dernier étant trop faible pour l'appareil, et n'ayant pas les moyens d'en acheter un deuxième, les frères Caudron durent envisager soit de construire un nouvel avion, soit de modifier le planeur existant, ce qu'ils entreprirent de faire à partir du 15 juillet suivant.
Équipé d'un Anzani à trois cylindres de 25 ch, le type A.11 avait 22 m2 de surface portante pour une envergure de 8 m et un poids total de 210 kg; son gauchissement était toujours rudimentaire. Le moteur entraînait une hélice propulsive bipale « Caudron frères », de 2,10 m de diamètre, tournant à 1 200 tr/mn par l'intermédiaire d'une démultiplication à chaîne. L'atterrisseur se composait de deux patins à deux roues fixes, utilisées pour le décollage.
Le 21 septembre 1909, l'appareil vola sur 700 m ou 800 m à quelque 2 m ou 3 m de hauteur. Au terme de plusieurs essais, la longueur du vol atteignit le kilomètre et ce trois ou quatre fois, en fonction surtout de la bonne volonté du moteur. Au cours de la neuvième expérience, qui eut lieu le lendemain, par temps venteux, l'arbre porte-hélice céda, brisant l'hélice elle-même et endommageant sérieusement l'appareil (le pilote était indemne).
L'avion fut réparé et le moteur monté cette fois-ci en prise directe, ce qui supprima la transmission par chaîne, si problématique; ainsi modifié, l'appareil fut désigné type A-111. Les résultats des expériences furent nettement meilleurs, et la presse locale, qui commençait à s'y intéresser, rameuta la population des alentours. En avril 1910, l'avion réussit à voler sur 10 km.
le biplace Caudron C-272 ,‹ Luciole » connut une carrière remarquable, dans les années trente, comme avion d'école et de tourisme. En 1936, il devint l'un des principaux appareils de l'Aviation populaire. Quelques avions de ce type volaient encore après la Seconde Guerre mondiale. |
C'est à cette époque que les frères Caudron abandonnèrent le hangar-atelier de Romiotte pour aller s'installer en bordure de la plage du Crotoy, un site infiniment plus propice aux essais que les champs de la ferme paternelle. Ils y édifièrent d'énormes hangars pouvant abriter plusieurs appareils.
La construction et les essais se poursuivaient désormais dans une ambiance de kermesse, attirant des visiteurs de plus en plus nombreux et de plus en plus intéressés. C'est au Crotoy que, pour répondre au désir de nombreux enthousiastes et curieux, Gaston et René Caudron fondèrent la célèbre école de pilotage qui allait rentabiliser leur affaire, laquelle commençait à coûter très cher. Ils avaient également créé à Rue une véritable usine de construction et de réparation aéronautique.
Les performances de leurs machines ne cessaient de s'améliorer. Au type B, équipé d'un moteur rotatif Gnome de 50 ch, et qui fut le prototype d'une longue lignée, succédèrent le type F du circuit européen, puis le type M, le premier monoplan construit par Caudron, et surtout le type H (doté d'un moteur Anzani de 60 ch) du Meeting de Monaco, dont la Marine nationale commanda deux exemplaires en attendant une série ultérieure.
Les premiers succès
En mai 1912 apparut le Caudron type G, qui donna naissance, en janvier 1914, au type G-11 à moteur Gnome de 50 ch ou 80 ch et surtout au type G-111.
Le G.3, qui datait de mai 1914, était un biplan biplace de 455 kg, pesant en charge quelque 735 kg. L'envergure de l'aile supérieure, repliable, était de 13,40 m et sa surface portante totale de 28,25 m2. Équipé d'un moteur rotatif Le Rhône de 80 ch, il pouvait atteindre 112 km/h au niveau de la mer et montait à 2 000 m en vingt minutes.
Son plafond pratique était de 4 000 m et son autonomie de quatre heures. Les quatre poutres supportant l'empennage bidérive étaient croisillonnées, les poutres inférieures, équipées de roues en diabolo, servant de patins à l'atterrissage. D'autres versions furent encore équipées de moteurs Anzani, Gnome et Clerget.
Le succès de cet avion devait rapidement se concrétiser par des marchés de série. Avec quelques G.2, il était utilisé au Crotoy, où un centre militaire avait également été créé. Entre-temps, le 3 mars 1911, Gaston Caudron avait obtenu son brevet de pilote (n" 434), son frère, quant à lui, possédant le sien (n° 180) depuis le 9 août 1910.
En 1913, René Caudron se rendit en Chine pour y réceptionner les douze G.3 vendus à ce pays en juin 1912. Durant son séjour, qui se prolongea jusqu'au Il août, il contribua à réprimer une insurrection locale, grâce à une opération d'observation aérienne, certainement une des premières du genre. C'est aussi sur G.3 que, le 7 mars 1914, le même René Caudron décolla à Fréjus depuis le pont du croiseur Foudre et que, le 21 novembre 1913, le pilote Chanteloup réussit le premier looping sur biplan. Robuste, maniable, facile à piloter, le G.3 assura la formation de près de dix-sept mille pilotes.
Mobilisé en 1914, René Caudron fut affecté à Reims. Devant la menace d'invasion allemande, Gaston transféra l'usine de Rue à Lyon pour assurer la construction des G.3, qui étaient désormais produits en grande série. Mais les commandes étaient si importantes que cette usine ne suffit bientôt plus.
un des prédécesseurs du Luciole, le Caudron C-109 de 1925; construit en nombre limité, l remporta de nombreux concours et s'adjugea plusieurs records du monde pour avions de tourisme. |
René fut alors détaché de l'armée avec pour mission de mettre sur pied une usine à Issy-les-Moulineaux. Bien que le volume de la production journalière eût atteint le stade industriel, Gaston, dans un premier temps, continuait à livrer personnellement ses avions, avec ses pilotes réceptionnaires : Chanteloup, Poulet, Boulard et Gervier, ce malgré les recommandations du ministère, qui demandait aux pilotes constructeurs de s'abstenir de voler et d'essayer leurs avions, leur vie étant trop précieuse pour la nation.
Sous les cocardes, le G.3 fut utilisé surtout comme avion de réglage de tir d'artillerie et pour la reconnaissance, rôle dans lequel il fut très apprécié, malgré le manque de visibilité de l'observateur, gêné par les haubanages. Les communications furent effectuées par lestage, panneautage et, plus tard, radiotéléphonie. Il équipait les escadrilles C.I I, C.17, C.18 et C.30.
Au 1 février 1916, il y avait cent quarante et un G.3 en service; ce chiffre était tombé à onze au 1 er octobre 1918. Présent sur tous les fronts (de l'Ouest aux Balkans), en versions terrestre et amphibie, en hydravion et même équipé de skis en Finlande, il fut exporté à plus de deux cents exemplaires et vendu aux Américains, aux Belges, aux Russes. Il fut également construit sous licence en Angleterre. (deux cent trente machines) par la British Caudron Co., et en Italie, par AER. La firme Caudron elle-même en avait produit quelque 1 420 exemplaires.
développement du Caudron G.3, le bimoteur G.4 était en service comme avion de reconnaissance et de bombardement en 1915. |
Avec l'introduction d'avions Caudron plus évolués, les G.3 furent petit à petit retirés du service et affectés aux missions de liaison, avant d'être rendus vers la fin de 1915 à leur vocation première, l'entraînement.
Quelques beaux exploits saluèrent la fin de cet avion, tels l'atterrissage de Védrines sur la terrasse des Galeries Lafayette, le 19 janvier 1919, et l'audacieuse traversée des Andes par Adrienne Bolland, le ler avril 1921.
Le G.4, version bimoteur du G.3, auquel il succéda dès mars 1915, était équipé soit de moteurs rotatifs Le Rhône de 80 ch, soit de moteurs Anzani de 100 ch sans capotage-moteur. L'envergure de l'aile supérieure était portée à 17,20 m. Le principe de construction restait le même que celui du G.3.
Le G.4 était armé d'une (parfois deux) mitrailleuse Lewis ou Vickers; le champ de tir était néanmoins sérieusement limité par la proximité des nacelles des moteurs et de la nacelle de l'équipage, qui débordait insuffisamment vers l'avant. Pesant quelque 1 310 kg en charge, l'avion avait une vitesse de 125 km/h à 2 000 m, altitude qu'il atteignait en quatorze à seize minutes.
Les essais ayant été jugés satisfaisants, le G.4 fut adopté par l'armée, qui l'utilisa comme avion d'observation (désigné A.2) dès novembre 1915 (il fut donc le premier bimoteur en service sous les cocardes), puis pour le bombardement (sous la désignation B.2). Grâce notamment à ses quatre gouvernes de direction, le G.4 pouvait voler sur un seul moteur. Il fut retiré des missions de bombardement du fait de sa trop faible charge de bombes (115 kg) et de son armement insuffisant. Quelques exemplaires furent transformés en version blindée pour les missions de harcèlement et d'observation rapprochée.
Sur les 1 358 G.4 construits par Caudron, cent soixante sept étaient en service au 1er février 1916 dans les escadrilles françaises, dont les C.34, C.46 et C.51. Quelques appareils furent acquis et construits sous licence en Grande-Bretagne et en Italie, ce dernier pays en ayant produit une cinquantaine. En outre, dix autres exemplaires furent en service au sein d'unités américaines en France. A partir de la fin de 1917, ces avions furent relégués en école. Le G.4 fut également en service sur les fronts russe et italien et utilisé par les Anglais en mer Égée.
Dès la fin des essais préliminaires du G.4, Caudron avait envisagé de lui donner un successeur, qui fut désigné G.S. Ce biplan bimoteur triplace, propulsé par deux moteurs Le Rhône de 80 ch, avait été essayé au printemps de 1915, mais par suite de sa trop faible puissance, il ne fut pas accepté.
Au G.5 succéda donc le R.4, ou Cau.40 A3, équipé de deux moteurs Renault 12 Db de 130 ch, qui fut la première production originale de l'usine de Lyon. L'appareil avait un fuselage conventionnel; son équipage était de trois hommes, le pilote étant placé entre les deux mitrailleurs, qui disposaient d'un champ de tir quasi intégral. Ce biplan monodérive apparut en juin 1915, mais, comparées à celles de ses prédécesseurs, ses performances ne furent pas jugées intéressantes; l'avion était de surcroît peu maniable.
Gaston Caudron, qui assurait en personne les essais de l'appareil, trouva la mort à Lyon le 15 décembre 1915, les ailes de l'avion s'étant repliées en vol par suite du déboitage des longerons, non boulonnés par inadvertance. Courageusement, René Caudron reprit le flambeau, assumant désormais la responsabilité de la totalité des usines Caudron et nommant Paul Deville directeur technique, responsable des avions nouveaux.
Durant ses essais, l'avion avait volé à 125 km/h à 2 000 m, altitude qu'il avait atteinte en quatorze minutes avec une charge totale de 500 kg. Malgré quelques reproches, concernant notamment son plafond, jugé tout juste suffisant, l'avion fut commandé à 249 exemplaires, dont 53 étaient effectivement en service au ler août 1916, les autres se trouvant en réserve générale.
Ses moyens de défense étaient étonnants; en octobre 1916, l'escadrille n" 210 réussit à abattre six avions ennemis, et la C.46 ne revendiqua pas moins de trente-quatre victoires en deux mois. Sous-motorisé pour les missions de bombardement, l'avion fut affecté à la reconnaissance, rôle dans lequel il excella.
le C-362 de vitesse, photographié à Étampes-Montdésir lors de la première Coupe Deutsch, en 1933. • L'avion finit deuxième à 317 km/h, handicapé par la puissance limitée du moteur Renault Bengali. Le C-362 fut la première grande réalisation de Marcel Riflard chez Caudron. |
Dérivé du G.5 A.3, le Caudron G.6 A.2 apparut en juin 1916 et entra en service en avril 1917. C'était un élégant bimoteur à dérive triangulaire Caudron. désormais classique. Équipé de moteurs rotatifs de 80 ch, 110 ch ou 130 ch, il avait une envergure de 17,20 m et pesait en pleine charge 1 440 kg; il était capable de monter en vingt-cinq minutes à 4 000 m, altitude à laquelle il atteignait 136 km/h.
Commandé à 750 exemplaires, il ne fut livré qu'à 512 unités. Au 1er août 1917, 133 appareils étaient en service, notamment au sein des escadrilles C.56 et C.21, alors que 102 autres étaient en réserve générale.
Paul Deville, déjà responsable du G.6, conçut alors le R.9, un biplace de 80 ch, qui, sous-motorisé, ne fut pas suivi. Cet ingénieur fut également responsable du seul chasseur monoplace Caudron, qui demeure, aujourd'hui encore, bien mystérieux. Mais son chef-d'oeuvre est sans conteste le R.1 11, descendant du R.4.
Le Caudron R.11 A3, ou type Cau.Xl A3, était à l'origine un triplace de corps d'armée, répondant au nouveau programme d'avions puissants émis par l'état-major en 1916. La vocation de l'appareil changea quand on s'aperçut qu'il avait les performances requises pour escorter les Breguet 14 B2. C'est ainsi qu'il devint, malgré sa taille, un chasseur à grande autonomie.
Plus fin que le R.4, le R.11 11 A3 était armé de deux mitrailleuses Lewis jumelées de 7,7 mm sur deux tourelles et d'une mitrailleuse ventrale de même calibre à grand champ de tir. Ces armes, très mobiles, étaient plus efficaces que les armes des chasseurs ennemis, ne tirant que dans une seule direction. Aussi le R.11 A3 fut-il un adversaire redoutable pour l'aviation allemande. N'étant pas obligé de manoeuvrer pour assurer une bonne protection, il pouvait se tenir près de ses protégés. Du moins le supposait-on à l'époque. L'avenir devait le confirmer.
Le R. 11 2, étudié en juin 1918, était une version du R. 11 1 équipée de moteurs Hispano-Suiza de 300 ch. En fait, des problèmes de mise au point à Issy-les-Moulineaux retardèrent sa sortie jusqu'en novembre 1918, date à laquelle il fut finalement abandonné. Une version plus grande du R.11 , propulsée par les mêmes moteurs Hispano, et désignée R.14 Ca3 Canon, fut également abandonnée peu après. La fin de la guerre mit un terme à la production de ces triplaces de protection.
Dans le domaine des bombardiers, Caudron avait produit le C-22, officiellement désigné Cau.22Bn2.
la grande famille des avions de course Caudron-Riffard aboutit en 1938 au chasseur léger C-714 Cl. Mais la formule ne donna pas les résultats escomptés. Manoeuvrable, mais nettement sous-motorisé, l'avion, en service en 1940 au GC-1/145, ne parvint pas à s'imposer face au puissant Bf-109E de la Luftwaffe. |
Apparu en mars 1917, ce biplan avait une envergure (aile supérieure) de 17,92 ni d'un seul tenant et une longueur de 11,22 m. Sa surface portante était de 54,25 m2; son poids, 1 422 kg à vide, atteignait 2 167 kg en charge. Avec deux moteurs Hispano-Suiza 8 Bda de 215/220 ch, il avait une vitesse maximale de 184 km/h à 2 000 m, altitude à laquelle il montait en huit minutes. Son plafond pratique était de 5 900 m, et son autonomie, en régime de protection, dépassait largement trois heures.
Alors que le grand quartier général avait commandé en mars 1917 plus de mille avions de combat, dont cent vingt Letord et Caudron R.11, la production fut sérieusement handicapée par les ennuis de mise au point des moteurs Hispano, et les retards commencèrent à s'accumuler. Au 11 er avril 1918, des soixante-dix R.1 11 commandés, trente-quatre seulement avaient été livrés, dont vingt étaient en escadrille et quatorze en réserve.
A l'Armistice, six escadrilles (C.46, 0.241, C.246. R.239, R.240 et R.242) étaient équipées de R.11 11 . Chacune en possédait de quinze à dix-huit, ce qui représentait au total deux cent cinquante à trois cents appareils réceptionnés, dont une centaine seulement en utilisation armée (réserve comprise), les autres étant en école d'entraînement.
Deux de ces escadrilles étaient affectées à la reconnaissance, quatre autres assuraient la protection rapprochée des Breguet 14 B2, par exemple lors de la grande opération du 27 octobre 1918, qui mit en oeuvre jusqu'à vingt-trois R.11, protégeant cent trente et un Bre.l4. Quelques R.11 11 furent détachés chez les Américains, et le Royal Flying Corps en reçut également deux pour évaluation en 1917. On n'en connaît pas d'autres utilisateurs.
la version c-401, baptisée nord destinéeaux missionsde liaison de l'armée de l'air. |
Apparu en novembre 1917, ce bombardier léger biplace de nuit était propulsé soit par deux moteurs Le Rhône 9Jb de 120 ch, soit par deux moteurs rotatifs Clerget de 130 ch. Ses performances et son armement ayant été jugés trop faibles, il fut abandonné. Vers la fin de la guerre, la conjoncture réclamait des avions de bombardement lourds.
A la suite de l'abandon des Voisin, remplacés par des Caproni, l'état-major avait demandé à Farman et à Caudron d'étudier un nouveau bombardier. Ce fut le bombardier lourd Caudron, conçu par Deville. Désigné C-23, ou Cau.23Bn2, il apparut en février 1918. 11l était propulsé par deux moteurs en étoile Salmson de 240/250 ch. Sa vitesse était de 140 km/h à 2 000 m (altitude atteinte en vingt et une minutes) et son plafond pratique de 3 500 m.
Prévu pour bombarder Berlin, grâce à son autonomie de six heures, il pouvait emmener une tonne de bombes. Mille appareils de ce type furent commandés, mais aucun des cinquante-quatre avions construits ne fut mis en service avant l'Armistice. Ce bombardier lourd fut l'un des derniers types d'avion conçus pendant la Première Guerre mondiale par la firme Caudron, qui, entre le mois d'août 1914 et le mois de novembre 1918, avait produit au total quelque quatre mille appareils. L'usine d'11ssy-les-Moulineaux s'étendait alors sur 9 000 m2 et occupait 1 300 ouvriers.
Pour pouvoir suivre les cadences qui lui étaient imposées, Caudron abandonna à l'État la licence de construction des G.3 et des G.4. Bel exemple de patriotisme, qui lui coûta plusieurs millions de francs-or et fut probablement à l'origine des difficultés que connut la firme au lendemain de la guerre. Ce geste eut pourtant une conséquence heureuse : il permit la rationalisation de la construction grâce à la standardisation des éléments, réalisée pour la première fois chez Blériot à l'époque du G.3, que ce constructeur sous-traita avec SPAD.
Les « tombereaux » Caudron
Après la guerre, ne pouvant se résigner à rester inactifs, beaucoup de pilotes, encouragés quelquefois par les constructeurs, se lancèrent dans la « bataille de l'aviation ». Ce fut le point de départ de la conquête pacifique de la planète pour tenter d'exporter la technique aéronautique française, qui avait alors besoin d'un second souffle.
Chez Caudron, c'est Boulard qui, dès le 10 février 1919, sur un C-23 rapidement aménagé et essayé le mois précédent, inaugura la ligne Paris-Bruxelles avec huit journalistes comme passagers, quarante-huit heures à peine après Lucien Bossoutrot, qui, sur Farman « Goliath », avait ouvert la voie du transport aérien sur Paris-Londres.
Jules Védrines héros populaire et pilote chez Caudron. où il assurait les essais du C-23 , se tua, avec son mécanicien Guillain, à SaintRambert-d'Albon le 21 avril 1919, par suite d'une panne de moteur, en tentant de relier Paris à Rome sans escale. Poulet et Benoît, essayant de rejoindre l'11ndochine à bord d'un vieux G.4, durent abandonner à Rangoon (leur appareil étant à bout de souffle) après un périple de quarante-six jours.
Mais la reconversion n'était pas facile. Caudron termina la série des C-23 de bombardement, dont quelques exemplaires furent transformés, dès janvier 1919, en C-23 bis, à cabine fermée, plus confortable, pour le transport de passagers. Ainsi modifiés, ils pouvaient emmener quinze personnes. Cette transformation se retrouva également sur quelques G.3, toujours en construction pour les écoles de pilotage françaises et étrangères.
Le C-25, apparu en décembre 1919 et conçu comme avion de transport pour vingt passagers, n'eut guère de succès. Pour écouler les stocks rendus disponibles. par l'arrêt de la production militaire, René Caudron imagina alors de fabriquer des tombereaux, ce qui lui permit dans l'immédiat de ne pas licencier du personnel. Mais ce n'était qu'un pis-aller et il dut, ultérieurement, renvoyer les deux tiers de ses effectifs.
C'est en avril 1920 qu'apparut le C-39, un trimoteur de 130 ch dont une version marine remporta avec Maïcon, le Concours de Monaco, que Poirée, chef pilote de Caudron, gagna sur C-51 dans sa catégorie. Le même Poirée se classa encore premier sur hydravion C-65 dans la course Marseille-Monaco.
Pendant ce temps, Deville continuait à sortir ses prototypes. Au C-43 (avril 1920), un énorme biplan à cinq moteurs Le Rhône de 80 ch, qui n'eut pas de suite, succéda le C-74, quadrimoteur géant prévu pour le Grand Prix des avions de transport de novembre 1922, à bord duquel Poirée trouva la mort le 14 novembre lorsqu'il s'abattit au Bourget. C'est Patin, le futur vainqueur de la Coupe Zénith de 1924, sur C-27 à moteur Le Rhône de 80 ch, qui lui succéda et qui donc mit au point les C-81, successeurs des C-61 et C-61 bis, apparus en novembre 1921.
Le C-61 était un grand biplan équipé de trois moteurs Hispano-Suiza de 180 ch et d'une envergure de 24,12 m. Sa charge utile était de 840 kg et son poids total de 3 480 kg. 11l pouvait emmener dix passagers à 115 km/h. Avec deux moteurs extérieurs Salmson de 260 ch, le moteur central restant un Hispano, cet avion devint le C-61 bis, dont le poids passait à 4 834 kg et la vitesse à 120 km/h.
Le C-81 FR (FR pour Franco-roumaine), essayé par Patin, était un arrangement du C-61 bis avec deux moteurs Salmson extérieurs de 260 ch et un moteur Lorraine central de 370 ch, qui lui assuraient une vitesse de croisière de 140 km/h. D'un pilotage délicat, il était destiné à la ligne de la Franco-roumaine, devenue C11DNA le le janvier 1925. Cette compagnie transeuropéenne, qui desservait Varsovie et Constantinople via Prague, avait en service au ler janvier 1926 sept C-81 et sept C-61. Elle acquit plus tard quelques monomoteurs quadriplaces C-92.
Dans le domaine de l'aviation d'entraînement, il faut citer, en 1921, le C-51 à moteur Clerget de 130 ch, le C-57, monoplace à moteur H ispano-Suiza de 180 ch, le C-127 et, enfin, le C-59, construit à plus de mille exemplaires et apparu en fin d'année. Le C-59 était un biplan biplace à moteur H ispano-Suiza 9AG de 180 ch, pesant quelque 1 030 kg en charge.
Sa vitesse au niveau de la mer était de 160 km/h; il atteignait 1 000 m en sept minutes et 3 000 m en vingt-deux minutes; à cette altitude, sa vitesse était encore de 155 km/h. Choisi lors d'un concours d'avions-écoles, il fut adopté par les centres militaires et, désigné C-59 ET2, fut présent dans toutes les écoles et dans toutes les sections d'entraînement des grandes formations. Construits jusque dans les années trente, ces appareils restèrent en service jusqu'en 1938.
Au 1er janvier 1936, on en répertoriait encore onze. Le C-59 ET2 fut adopté par la Turquie, la Belgique, l'Espagne, le Portugal, la Roumanie et la Bulgarie. Une version peu connue, à moteur en étoile de 230 ch, fut essayée en décembre 1932.
Précédant de peu le C-59, le C-60 était pourtant son cadet; équipé d'un moteur rotatif Clerget de 130 ch, c'était également un excellent avion d'entraînement, malgré ses performances plus modestes. 11l fut commandé à douze exemplaires par la Finlande, qui en acquit la licence de construction et en produisit trente-quatre exemplaires en 1927. 11ls restèrent en service dans ce pays jusqu'en 1933-1934. En France, il y avait encore un C-60 ( F-A11NX) en 1955. (Le C-251, apparu en 1931 et destiné à remplacer le C-59, ne connut pas de succès.)
En 1923, Paul Deville quitta la firme pour entrer chez Dewoitine. C'est peu de temps après qu'apparurent le C-99 et le C-101 GR (GR : grande reconnaissance), qui furent suivis du C-104 et du C-109. Aucun de ces appareils ne fut retenu. Notons que le C-101 était présent au Salon de Paris en 1926, équipé d'un moteur Hispano de 450 ch, ses variantes étant les C-103, C-104 et C-107. Le plus rapide fut le C-101, avec des vitesses de 227 km/h sur base et de 204 km/h à 5 000 m, où il montait en 28 mn 25 s au poids de 1 943 kg. Mais c'est le Potez 25 GR qui remporta le marché dans le cadre de ce programme pour un biplace de grande reconnaissance.
Caudron eut plus de succès avec son C-17 (ou C-170), avion d'observation métallique sesquiplan apparu en 1922 et construit sur les plans de l'ingénieur Brunet, associé à Descamps. Désigné à l'origine DB-11 6 A2, le deuxième prototype devint le Descamps 17 A2 avec un moteur Lorraine 12 Ed de 450 ch, et c'est sous cette forme qu'il fut acheté, avec sa licence de construction, par Caudron. Un troisième exemplaire devait servir de prototype à la définition série, l'avion ayant été adopté en nombre limité par l'état-major. D'une envergure de 14,50 m et d'un poids total de 2 045 kg, il avait une vitesse maximale de 222 km/h, montait à 5 000 m en vingt-cinq minutes et pouvait franchir à cette altitude 1 000 km.
Dans le domaine de l'aviation légère, le succès fut plus significatif. Comme Mauboussin, Albert et Farman, Caudron allait créer un avion de très petite puissance, appelé « avionnette ». Ce fut d'abord le C-109 de mai-juin 1925, conçu par Talpin. Construit à une vingtaine d'exemplaires, ce monoplan biplace à aile parasol était équipé d'un moteur Salmson 9Ad de 40 ch quelquefois d'un Anzani de 45 ch qui lui assurait une vitesse de 122 km/h au poids de 532 kg. Le C-109 devint vite célèbre, notamment avec Thorez, Finat, Knipping et Delmotte, devenu chef pilote chez Caudron après le départ de Patin en 1924.
Dans sa catégorie, cet avion remporta : en mai 1925, le Concours international de tourisme de Bruxelles; en août 1925, le Concours de consommation de Vauville et la Coupe d'11talie; en août 1927, le Concours international d'avions légers à Zurich. Aménagé en monoplace (C-109/1), il s'adjugea également le record du monde de distance en ligne droite avec Thorez, qui le 18 mai 1927 parcourut 868 km sur Paris-Berlin; le record du monde en circuit fermé avec Delmotte, qui couvrit une distance de 1 535 km le 25 août 1928; enfin le record du monde de durée (24 h 36 mn) avec Finat, le 11 er septembre 1928.
Revenu chez Caudron, Paul Deville conçut en 1929 la famille des C-230, 232 et 233, qui apparurent en 1930 et furent construits en assez grande série. 11l y eut même un C-235, qui fut commandé en série limitée pour les écoles de pilotage de l'armée à partir de 1931. Les dérivés C-272 Luciole (moteur Renault de 95 ch), qui succédèrent au C-230 à partir d'avril 1931, connurent également le succès. Ils furent suivis par le C-270 à moteur Salmson de même puissance, par le C-278 à moteur Salmson de 135 ch et par le C-276 à moteur Gipsy de 105 ch.
Les Luciole eurent une carrière remarquable, le succès étant immédiat. Construits en grande série, ces biplans biplaces à aile repliable firent la joie des pilotes de tourisme; en 1936-1937, 275 nouvelles machines furent produites au titre de l'Aviation populaire, dont la grande majorité fut réquisitionnée en 1939-1940; quelques exemplaires servaient encore au remorquage des planeurs à l'École de l'Air en 1946.
Un grand nombre de Luciole étaient également en service dans les écoles Caudron de Royan, de Guyancourt et surtout d'Ambérieu, où l'école du Crotoy avait été transférée en 1928. A leurs côtés, apparurent, en avril 1932, les C-286 Phalène à moteur Gipsy de 105 ch. Le Phalène était un monoplan quadriplace à aile haute, cette formule monoplane étant apparue en juin 1928 avec le C-109. 11l y eut parmi ces Phalène de nombreuses variantes, dont le 286/2 à moteur Salmson de 135 ch et le C-282 à moteur Renault de 120 ch, qui fut produit en grande série.
Son succès fut tel que l'état-major en commanda plus tard quarante exemplaires, désignés C-400, pour ses missions de liaison. Les derniers furent réceptionnés en juillet et août 1934, et servirent surtout comme avions estafettes dans les sections d'entraînement des unités. D'autres furent réquisitionnés en 1939 et 1940 dans les clubs et utilisés dans les sections d'avions légers (SAL). D'autres encore furent remis en état après la guerre par Nord-Aviation et utilisés dans les clubs jusque dans les années soixante.
Parmi les autres prototypes intéressants réalisés par Caudron dans divers domaines, signalons le C-240, conçu par Deville et apparu à la fin de 1931. Cet avion de tourisme, de lignes très modernes, avait de mauvaises qualités de vol, ce qui en motiva l'abandon. L'amphibie de tourisme conçu par Viscaya en 1932 et désigné Caudron PV-200 ne fut pas retenu non plus.
Citons encore la série des C-180, trimoteurs dits « coloniaux » qui apparurent à cette même époque. Équipés de trois moteurs Lorraine Algol (C-180) ou de trois moteurs Gnome-Rhône (C-187) de 300 ch et pesant quelque 5 000 kg en charge, ils croisaient à une vitesse de 225 km/h. Très en vogue à cette époque, ils n'obtinrent cependant pas le succès escompté, l'état-major leur ayant préféré le Potez 25 TOE.
Une nouvelle raison sociale : Caudron-Renault
En proie à de graves difficultés financières, menacée de disparition, la firme de René Caudron fit l'objet d'une opération de sauvetage entreprise au niveau de l'État. Louis Renault, pressenti, accepta de développer son département aviation, sauvant ainsi Caudron.
L'opération devait surtout permettre à Renault de s'adjoindre les services de Marcel Riflard, un des plus grands aérodynamiciens de tous les temps, qui, chez Caudron depuis mars 1932, avait toujours refusé de quitter cette firme. C'est au terme de longues tractations, concernant surtout la définition de la nouvelle raison sociale, que naquit le 1 er juillet 1933, la société Caudron-Renault.
Marcel Riflard, placé directement sous les ordres de François Lehideux (le « grand patron » de chez Renault), prit la succession de Paul Deville, qui avait quitté la firme au début de l'année. Sous son impulsion, la production de la nouvelle firme sera caractérisée par des avions aux lignes pures, dont les silhouettes deviendront vite familières au grand public.
le Caudron C-640-05 Typhon » (F-AODR), baptisé Louis Blériot, engagé par Maurice Rossi dans la course Istres-Damas-Paris en 1937. Huit avions de ce type furent construits sous la forme d'avions de records et de course. |
Caudron lui ayant toujours permis de « s'exprimer », c'est tout naturellement que Riflard en vint à la Coupe Deutsch, séduit par la limitation de la cylindrée à 8 litres, ce qui lui offrait un terrain à la mesure de ses ambitions. Rappelons que le règlement de cette Coupe internationale Suzanne-Deutsch de la Meurthe (traitée dans un numéro ultérieur) prévoyait deux vols de 11 000 km, la coupe elle-même étant constituée par un objet d'art remis en compétition tous les ans.
Si un concurrent remportait trois fois la coupe (consécutivement ou non), celle-ci devenait la propriété définitive de l'aéro-club national auquel adhérait ledit concurrent. Caudron, qui avait engagé plusieurs appareils en mai 1933, joua de malchance, comme d'ailleurs beaucoup d'autres constructeurs.
Le C-360 à moteurs Baudot n'étant pas prêt, et le C-366 ayant été accidenté lors des essais préliminaires, il ne restait plus qu'un C-362, l'autre ayant été détruit par Arrachart lors de l'accident dans lequel il trouva la mort. Ce C-362, piloté par Delmotte, termina deuxième derrière Detré, sur Potez 53.
Alors que la vitesse moyenne du vainqueur était de 322,800 km/h avec un moteur de 310 ch, Delmotte, lui, atteignit 317,040 km/h avec un moteur de 170 ch seulement. Aucun moteur de 8 litres de cylindrée n'étant disponible chez Renault, Riflard avait fait modifier un moteur Renault 4 Pdi de 140 ch en le poussant jusqu'à 165/170 ch seulement; la performance n'en était donc que plus remarquable.
Le C-362 fut un chef de file prolifique. C'était un monoplan monoplace à aile basse de 6,80 m d'envergure pour une longueur de 7,07 m et une surface portante de 7 m2. Sa vitesse maximale frisait les 345 km/h au poids de 700 kg environ. La structure était en spruce recouvert de contre-plaqué, le tout étant finalement entoilé et laqué pour obtenir le beau fini de surface indispensable pour obtenir de grandes vitesses.
C'est d'ailleurs l'ensemble de ces particularités qui avaient déjà permis à Delmotte de s'octroyer, dès le 22 mai 1933, le record international de vitesse sur 100 km en classe C (avions légers monoplaces pesant moins de 450 kg à vide) à 333,765 km/h. Le même pilote, à bord du même appareil, devait d'ailleurs s'adjuger le 26 décembre 1933, à Istres, le record international de vitesse sur 11 000 km à 332,883 km/h, tout en améliorant encore son record sur 100 km. porté sur cet avion à 345,62 km/h le 2 mai 1934.
En mai 1934 apparut le C-450 de la génération des dérivés puissants de ces premiers C-360 et 362. Équipé d'un moteur Renault 433 à six cylindres à compresseurs, il développait 330 ch. L'envergure avait été ramenée à 6,75 m et la longueur, portée à 7,12 m; cet avion avait un poids total de 875 kg et une vitesse maximale de 456 km/h.
Monoplan monoplace comme son aîné, il fut engagé sous le numéro 13 dans la Coupe Deutsch de 1934, qu'il gagna, piloté par Arnoux qui réalisa 389 km/h de moyenne devant Massotte, deuxième sur C-366, et Monville, troisième sur C-460, une version à train rentrant du C-450, dont la mise au point ne fut pas achevée.
Quelques jours plus tôt, le 24 mai 1934, Delmotte avait porté le record de vitesse sur 100 km à 431,645 km/h sur ce même C-450 13, et Hélène Boucher pulvérisa également d'autres records à bord de la même machine à 11stres les 8, 10 et 11 août.
Trois C-460 furent construits, dont l'un permit à Delmotte, le 25 décembre 1934, de battre le record du monde de vitesse sur base pour avions terrestres toutes catégories à 505,848 km/h, un chiffre fabuleux pour l'époque, qui rehaussa l'image de marque de Delmotte, de Riflard et de Caudron-Renault. C'était,en effet, la première fois qu'un avion terrestre dépassait le cap des 500 km/h.
dérivé des avions de la Coupe Deutsch, le Caudron C-580 n° 1 (F-ANAS) était un monoplace destiné à l'entraînement et à la chasse. Refusé par l'armée de l'Air, il servit à Raymond Delmotte dans diverses démonstrations de voltige. |
suite...
Le même appareil, confié à Michel Détroyat, permit à ce dernier, les 4 et 7 septembre 1936, aux États-Unis, de remporter à la stupéfaction générale le Thompson Trophy Race et le Greve Trophy Race, devant des monstres américains de 750 ch à 1 000 ch, atteignant respectivement lors de ces épreuves 422 km/h et 438 km/h. Vexés, les Américains firent démonter le moteur pour vérification de la cylindrée imposée (9,50 litres au maximum). 11ls durent se rendre à l'évidence. C'était là le grand triomphe de l'aérodynamisme.
Le C-460 avait déjà fait parler de lui en 1935, quand il avait gagné la Coupe Deutsch avec Delmotte à la moyenne de 443,965 km/h, devant Lacombe, sur C-460 également, et Arnoux, sur C-450. Pendant cette course, Delmotte battit également les records de vitesse sur 100 km et 1 000 km. respectivement à 469 km/h et 446 km/h (cette troisième victoire avait d'ailleurs permis l'attribution finale de la coupe à l'Aéro-Club de France).
Durant cette même manifestation, on avait pu remarquer un nouveau venu, désigné C-560, dérivé du C-460 et terminé un mois à peine avant l'épreuve. Équipé d'un moteur Renault 446 à douze cylindres de 450 ch, il ne fut pas qualifié par suite d'ennuis de moteur, celui-ci n'étant pas tout à fait au point; les mêmes ennuis affectèrent également le deuxième exemplaire de ce type. En modifiant ultérieurement le fuselage du C-560 pour y adapter un pare-brise noyé et une dérive ronde, on en fit le C-561, qui devait dépasser 560 km/h avec le même moteur légèrement amélioré.
La coupe fut remise en compétition en 1936; la participation se réduisit cette année-là à une écurie Caudron-Renault avec un C-560, un C-561 (qui d'ailleurs ne fut pas qualifié), un C-450 qui gagna la course, piloté par Lacombe, à 389,462 km/h de moyenne, et enfin deux C-461, dont l'un, piloté par Arnoux, termina deuxième, tandis que l'autre avec Delmotte aux commandes, abandonnait sur ennuis de moteur. Cette course, disputée dans de mauvaises conditions météorologiques, fut décevante du fait de l'abstention des concurrents étrangers et des difficultés de mise au point des moteurs.
Le C-461 n'était qu'un C-460 à moteur Renault 456 de 370 ch, à pare-brise noyé et dérive ronde, à l'image du C-561 mais d'un dessin différent cependant. Les ailes du C-461 et du C-561 étaient construites d'une seule pièce, le profil adopté étant un biconvexe symétrique à hautes performances. Les deux longerons caissons en spruce, limbo et contre-plaqué charpentaient l'aile à revêtement travaillant, équipée de volets d'intrados et abritant un train escamotable oléopneumatique. Les mêmes matériaux étaient utilisés pour le fuselage, le tout étant entoilé et laqué. Ce procédé était cher à Riffard, qui avait toujours été partisan du bois à cause de sa bonne tenue à la déformation et surtout de la simplicité de construction qui en résultait.
le biplace Caudron C-530 de la famille des Rafale avec lequel l'équipage Lacombe-Trivier remporta, le 8 juillet 1934, les Douze Heures d'Angers à la moyenne de 240 km/h sur un parcours de 2 885 km. |
L'opération devait surtout permettre à Renault de s'adjoindre les services de Marcel Riflard, un des plus grands aérodynamiciens de tous les temps, qui, chez Caudron depuis mars 1932, avait toujours refusé de quitter cette firme. C'est au terme de longues tractations, concernant surtout la définition de la nouvelle raison sociale, que naquit le 1 er juillet 1933, la société Caudron-Renault. Marcel Riflard, placé directement sous les ordres de François Lehideux (le « grand patron » de chez Renault), prit la succession de Paul Deville, qui avait quitté la firme au début de l'année. Sous son impulsion, la production de la nouvelle firme sera caractérisée par des avions aux lignes pures, dont les silhouettes deviendront vite familières au grand public.
Caudron lui ayant toujours permis de « s'exprimer », c'est tout naturellement que Riflard en vint à la Coupe Deutsch, séduit par la limitation de la cylindrée à 8 litres, ce qui lui offrait un terrain à la mesure de ses ambitions. Rappelons que le règlement de cette Coupe internationale Suzanne-Deutsch de la Meurthe (traitée dans un numéro ultérieur) prévoyait deux vols de 11 000 km, la coupe elle-même étant constituée par un objet d'art remis en compétition tous les ans. Si un concurrent remportait trois fois la coupe (consécutivement ou non), celle-ci devenait la propriété définitive de l'aéro-club national auquel adhérait ledit concurrent. Caudron, qui avait engagé plusieurs appareils en mai 1933, joua de malchance, comme d'ailleurs beaucoup d'autres constructeurs. Le C-360 à moteurs Baudot n'étant pas prêt, et le C-366 ayant été accidenté lors des essais préliminaires, il ne restait plus qu'un C-362, l'autre ayant été détruit par Arrachart lors de l'accident dans lequel il trouva la mort. Ce C-362, piloté par Delmotte, termina deuxième derrière Detré, sur Potez 53. Alors que la vitesse moyenne du vainqueur était de 322,800 km/h avec un moteur de 310 ch, Delmotte, lui, atteignit 317,040 km/h avec un moteur de 170 ch seulement. Aucun moteur de 8 litres de cylindrée n'étant disponible chez Renault, Riflard avait fait modifier un moteur Renault 4 Pdi de 140 ch en le poussant jusqu'à 165/170 ch seulement; la performance n'en était donc que plus remarquable. Le C-362 fut un chef de file prolifique. C'était un monoplan monoplace à aile basse de 6,80 m d'envergure pour une longueur de 7,07 m et une surface portante de 7 m2. Sa vitesse maximale frisait les 345 km/h au poids de 700 kg environ. La structure était en spruce recouvert de contre-plaqué, le tout étant finalement entoilé et laqué pour obtenir le beau fini de surface indispensable pour obtenir de grandes vitesses. C'est d'ailleurs l'ensemble de ces particularités qui avaient déjà permis à Delmotte de s'octroyer, dès le 22 mai 1933, le record international de vitesse sur 100 km en classe C (avions légers monoplaces pesant moins de 450 kg à vide) à 333,765 km/h. Le même pilote, à bord du même appareil, devait d'ailleurs s'adjuger le 26 décembre 1933, à Istres, le record international de vitesse sur 11 000 km à 332,883 km/h, tout en améliorant encore son record sur 100 km. porté sur cet avion à 345,62 km/h le 2 mai 1934. En mai 1934 apparut le C-450 de la génération des dérivés puissants de ces premiers C-360 et 362. Équipé d'un moteur Renault 433 à six cylindres à compresseurs, il développait 330 ch. L'envergure avait été ramenée à 6,75 m et la longueur, portée à 7,12 m; cet avion avait un poids total de 875 kg et une vitesse maximale de 456 km/h. Monoplan monoplace comme son aîné, il fut engagé sous le numéro 13 dans la Coupe Deutsch de 1934, qu'il gagna, piloté par Arnoux qui réalisa 389 km/h de moyenne devant Massotte, deuxième sur C-366, et Monville, troisième sur C-460, une version à train rentrant du C-450, dont la mise au point ne fut pas achevée. Quelques jours plus tôt, le 24 mai 1934, Delmotte avait porté le record de vitesse sur 100 km à 431,645 km/h sur ce même C-450 13, et Hélène Boucher pulvérisa également d'autres records à bord de la même machine à 11stres les 8, 10 et 11 août. Trois C-460 furent construits, dont l'un permit à Delmotte, le 25 décembre 1934, de battre le record du monde de vitesse sur base pour avions terrestres toutes catégories à 505,848 km/h, un chiffre fabuleux pour l'époque, qui rehaussa l'image de marque de Delmotte, de Riflard et de Caudron-Renault. C'était,en effet, la première fois qu'un avion terrestre dépassait le cap des 500 km/h.
Le même appareil, confié à Michel Détroyat, permit à ce dernier, les 4 et 7 septembre 1936, aux États-Unis, de remporter à la stupéfaction générale le Thompson Trophy Race et le Greve Trophy Race, devant des monstres américains de 750 ch à 1 000 ch, atteignant respectivement lors de ces épreuves 422 km/h et 438 km/h. Vexés, les Américains firent démonter le moteur pour vérification de la cylindrée imposée (9,50 litres au maximum). 11ls durent se rendre à l'évidence. C'était là le grand triomphe de l'aérodynamisme. Le C-460 avait déjà fait parler de lui en 1935, quand il avait gagné la Coupe Deutsch avec Delmotte à la moyenne de 443,965 km/h, devant Lacombe, sur C-460 également, et Arnoux, sur C-450. Pendant cette course, Delmotte battit également les records de vitesse sur 100 km et 1 000 km. respectivement à 469 km/h et 446 km/h (cette troisième victoire avait d'ailleurs permis l'attribution finale de la coupe à l'Aéro-Club de France). Durant cette même manifestation, on avait pu remarquer un nouveau venu, désigné C-560, dérivé du C-460 et terminé un mois à peine avant l'épreuve. Équipé d'un moteur Renault 446 à douze cylindres de 450 ch, il ne fut pas qualifié par suite d'ennuis de moteur, celui-ci n'étant pas tout à fait au point; les mêmes ennuis affectèrent également le deuxième exemplaire de ce type. En modifiant ultérieurement le fuselage du C-560 pour y adapter un pare-brise noyé et une dérive ronde, on en fit le C-561, qui devait dépasser 560 km/h avec le même moteur légèrement amélioré. La coupe fut remise en compétition en 1936; la participation se réduisit cette année-là à une écurie Caudron-Renault avec un C-560, un C-561 (qui d'ailleurs ne fut pas qualifié), un C-450 qui gagna la course, piloté par Lacombe, à 389,462 km/h de moyenne, et enfin deux C-461, dont l'un, piloté par Arnoux, termina deuxième, tandis que l'autre avec Delmotte aux commandes, abandonnait sur ennuis de moteur. Cette course, disputée dans de mauvaises conditions météorologiques, fut décevante du fait de l'abstention des concurrents étrangers et des difficultés de mise au point des moteurs. Le C-461 n'était qu'un C-460 à moteur Renault 456 de 370 ch, à pare-brise noyé et dérive ronde, à l'image du C-561 mais d'un dessin différent cependant. Les ailes du C-461 et du C-561 étaient construites d'une seule pièce, le profil adopté étant un biconvexe symétrique à hautes performances. Les deux longerons caissons en spruce, limbo et contre-plaqué charpentaient l'aile à revêtement travaillant, équipée de volets d'intrados et abritant un train escamotable oléopneumatique. Les mêmes matériaux étaient utilisés pour le fuselage, le tout étant entoilé et laqué. Ce procédé était cher à Riffard, qui avait toujours été partisan du bois à cause de sa bonne tenue à la déformation et surtout de la simplicité de construction qui en résultait.
Prévus exclusivement pour la compétition, les Caudron type « Coupe Deutsch » disparurent après 1936, lors de la dernière course, désormais menacée par les bouleversements sociaux et les événements politiques internationaux. Les C-430 et 530, qui constituaient la génération économique des dérivés des C-360 et 362, en fait les premiers, apparurent successivement en mars et mai-juin 1934. Ce furent les Rafale, qui allaient être à l'aviation de tourisme ce que les C-460 et 560 étaient à l'aviation de compétition. Équipé d'un moteur Renault 4 Pdi de 120 ch, le C-430 avait une envergure de 7,70 m, une longueur de 7,10 m et une surface portante de 9 m2, pour un poids total de 820 kg. Monoplan biplace en tandem à aile basse et à train fixe, le C-430 ne tarda pas à se révéler aux mains d'Hélène Boucher durant les Douze Heures d'Angers. C'est d'ailleurs sur le même avion, immatriculé F-AMVB, que cette aviatrice se tua à Guyancourt le 30 novembre 1934, à l'âge de vingt-six ans. Le deuxième exemplaire, désigné C-430/1 et équipé d'un moteur Renault 4 Pei de 140 ch, était une version monoplace qui reçut ultérieurement un moteur de 180 ch pour lui permettre de disputer avec Franco la Coupe Deutsch de 1935 en remplacement du C-560, qui n'était pas prêt pour la compétition. Son pilote fut néanmoins forcé d'abandonner par suite d'ennuis de moteur. Le C-530 était la version biplace du C-430/1. La surface alaire était passée de 9 m2 à 12,08 m2, et la charge alaire avait été ramenée de 91 kg/m2 à 75 kg/m2, ce qui rendait l'appareil beaucoup moins délicat à piloter. Des volets d'intrados et une hélice à pas réglable en vol (une des premières adaptations pratiques de cette innovation) lui permettaient de tirer le meilleur parti de son moteur. Ces C-530 se classèrent premiers dans toutes les manifestations sportives de l'époque et surtout dans les épreuves d'endurance, comme les Douze Heures d'Angers de 1934 et le Grand Prix de l'Aéro-Club de France; ils établirent également de nombreux records mondiaux dans leur catégorie avec Puget, Arnoux et Lacombe. La vitesse maximale du C-530 était de 310 km/h et sa vitesse de croisière, de 275 km/h; il se posait à 80 km/h. En version monoplace, il était même capable de franchir des distances supérieures à 1 300 km (il atteignit même 2 200 km) grâce à un réservoir en option de grande capacité. L'appareil était construit en bois, Six exemplaires en furent produits, dont trois devinrent des C-660 après modification de leur surface alaire, ramenée à 9 m2, et montage d'une hélice à pas variable à commande électrique, à partir de 1935. Piloté par Arnoux, un de ces avions gagna les Douze Heures d'Angers en 1935. Les années 1933 et 1934 constituèrent l'âge d'or de la jeune firme Caudron-Renault, détentrice à l'époque de vingt records du monde, dont quatre records toutes catégories, sur 100 km et 1 000 km. Le C-680, à moteur Renault de 240 ch, est aujourd'hui encore un avion peu connu, dont l'origine reste à définir. C'est sur une version de cet appareil, le C-684, que Maryse Hilsz remporta deux fois (1935 et 1936) la Coupe Hélène-Boucher, créée pour perpétuer le souvenir de cette grande aviatrice. Simoun et Goéland Parmi les dérivés économiques des C-360 et 362 équipés de moteurs Renault Bengali de 170 ch, il faut citer, en août 1934, les fameux Simoun C-500, 520 et 620, des quadriplaces de grand tourisme capables de dépasser 300 km/h, prévus pour le Challenge international de tourisme, disputé en Pologne. Seul le C-620 fut terminé; exposé au XI Ve Salon de l'aéronautique de Paris en 1934, il ne fut cependant pas prêt pour la compétition. Très admiré au Salon, le C-620 présentait la même allure générale que les bolides de la Coupe Deutsch, avec des ailes réalisées suivant le même principe de construction, mais un fuselage entièrement nouveau, avec des éléments métalliques dans la structure et au niveau de l'habitacle. Il fut produit à un petit nombre d'exemplaires, le prototype ayant bientôt été tranformé en C-630, lequel n'avait que deux fenêtres latérales (au lieu de trois sur l'avion d'origine). Ce sont encore des moteurs Renault Bengali à six cylindres de différents modèles qui équipèrent les versions de série C-630 (moteur 6Q-07 de 180 ch) et C-635 (6Q-09 de 220 ch), ce dernier étant la version principale des Simoun, alors que les C-631, 632, 633 et 634, sous-versions du premier type, ne furent produits qu'en nombre limité. Le C-635 et le C-635 M, sa version militaire, équipée du même moteur, présentaient les caractéristiques suivantes, les chiffres entre parenthèses s'appliquant au C-635 M : envergure, 10,40 m; longueur, 9,10 m; surface portante, 16 m2; poids à vide, 900 kg (952 kg); poids total, 1 380 kg (11 370 kg). La vitesse maximale (310 km/h), la vitesse de croisière (280 km/h) et la vitesse d'atterrissage (110 km/h) étaient les mêmes pour les deux appareils. Le moteur entraînait une hélice bipale Ratier à pas variable, une des premières du genre à être montée en grande série. Le système en était constitué par une vessie gonflable au sol (à la pompe à vélo...!), maintenant par pression l'hélice au petit pas pour le décollage et permettant de la ramener au grand pas en vol pour la croisière. Le C-630 et le C-633 étaient utilisés par la compagnie Air Bleu, que dirigeait Didier Daurat, alors persuadé que les Simoun pouvaient assurer le transport du courrier. Ayant réussi à convaincre Georges Mandel, à l'époque ministre des PTT, du bien-fondé de ses idées, il en acquit d'abord six puis cinq autres (C-630 et C-635).
Le vol inaugural eut lieu le 10 juillet 1935 avec l'équipage Vannier-Beaufol, à destination de Tours, Angoulême, Poitiers et Bordeaux. Équipés de compas gyroscopiques, les Simoun volèrent par tous les temps, aidés par une infrastructure naissante (radiotéléphonie et balises émettrices). Les clients, cependant, boudaient ce nouveau moyen de transport du courrier qui, bien que très rapide, était grevé d'une forte surtaxe aérienne. Interrompu une première fois en août 1936, le service reprit en juillet 1937, après la suppression de cette surtaxe, pour fonctionner ensuite jusqu'à la veille de la guerre, le parc matériel ayant été renforcé entre-temps par trois Goéland, ce qui permit de transporter à cette date quelque cinquante millions de lettres. Ce service postal reprit après l'armistice, avec le même matériel, pour cesser définitivement à la fin de 1942. Trois autres C-635 furent affectés aux lignes postales de Madagascar, où ils furent employés jusqu'en 1949. Du fait de ses brillantes performances, l'avion fut également utilisé pour des raids, dans lesquels il connut des fortunes diverses. C'est ainsi que, le 18 décembre 1935, l'équipage Genin-Robert réussit la liaison Le Bourget-Tananarive, soit 8 665 km, en 57 h 36 mn. En décembre 1937, Maryse Hilsz couvrit la distance Paris-Saigon en moins de quatre jours. Après sa magnifique performance en U.R.S.S. en 1936, c'est aussi à bord d'un C-635 que Maryse Bastié traversa l'Atlantique Sud le 30 décembre 1936. Sous les cocardes, le C-635 M fut utilisé pour l'entraînement dans les écoles de transformation (en attendant l'arrivée d'avions plus spécifiques), comme avion de liaison et comme avion d'évacuation sanitaire. Sur les quelque six cent cinquante avions commandés au titre des différents marchés, un peu plus de cinq cents avaient été effectivement produits au 11O mai 1940. Toutes ces machines étaient utilisées, avec une soixantaine d'appareils réquisitionnés, en plus des affectations déjà vues précédemment, comme avions estafettes, alors que d'autres servaient encore dans les grandes formations. Les Allemands saisirent un peu plus de cent machines en novembre 1942, notamment dans les écoles de Bourges, d'Istres, d'Avord. 11ls furent utilisés jusqu'en 1945. Quant aux rescapés d'Afrique du Nord, ils servirent à Meknès et dans d'autres écoles jusqu'en 1945, date à laquelle ils disparurent, faute de pièces de rechange. Utilisé avec le Simoun comme avion postal, le Goéland connut également une carrière exceptionnelle. Conçu par l'équipe Riffard et désigné C-440, le prototype apparut en mars 1935. Cet élégant bimoteur léger à train escamotable, étudié à la demande d'Air Bleu pour un éventuel service postal de nuit, était propulsé par deux moteurs Renault 6Q de 180/220 ch, entraînant des hélices bipales Ratier à pas variable. D'une envergure de 17,55 m et d'une longueur de 13,66 m, il avait un poids à vide de 1 843 kg et un poids total de 3 300 kg. Sa vitesse approchait les 290 km/h au niveau du sol et 260 km/h à 1 500 m en croisière, ce qui lui permettait de franchir des étapes de 1 500 km. Les versions de série furent le C-441 (utilisé en petit nombre par Air Bleu), le C-444 (en service sur les lignes africaines et dans les forces aériennes belges) et le C-445, à moteur Renault 6Q-10/11 11 de 220 ch. Ce dernier n'était qu'un C-444 à voilure modifiée; il fut utilisé par Air France et par l'armée (C-445 M). En équipant de moteurs 6Q-20/21 des cellules de C-444 et de C-445, on obtint les C-448, utilisés surtout sur les lignes africaines. Enfin, avec les nouveaux moteurs à compresseurs Renault 6Q-20/21 de 300 ch tournant à 2 500 tr/mn naquit le C-449, qu'Air France mit en service après la guerre sur ses lignes secondaires. En janvier 1946, cette compagnie disposait de quarante-deux Goéland, dont dix-neuf C-449. Cette version, aménagée en différents dérivés, fut utilisée par de nombreuses compagnies européennes. La construction des C-445 se poursuivit durant toute l'Occupation ; l'avion était alors connu sous le nom d'AA11 (Ateliers aéronautiques d'Issy).
Après la guerre apparut le C-449, dernière version de cette série, qui fut construit par la Société nationale de constructions aéronautiques du Nord (SNCAN), qui avait absorbé Caudron-Renault. Utilisé comme avion de transport, il pouvait emmener six passagers ou l'équivalent de poids en fret sur une distance de 700 km à 265 km/h. Le C-445 M, commandé en grande série par l'état-major, servit surtout en école et en liaison et, accessoirement, pour l'évacuation sanitaire. Quatre C-445 furent achetés par l'armée italienne, et de nombreux exemplaires furent saisis par les Allemands en novembre 1942, date à laquelle on recensa quelque cinquante-quatre Goéland et cent dix Simoun d'origines diverses, utilisables par l'ennemi. L'avion fut aussi largement employé par l'armée de l'Air et, plus modestement, par l'Aéronavale. Il resta en service dans les ELA (escadrilles de liaison aérienne) et d'autres unités d'entraînement jusqu'à 1953-1954. Par suite d'anomalies au niveau de la numérotation, il est difficile de savoir quel fut exactement le nombre de machines construites, le total devant néanmoins se situer entre 1 422 et 1 702 unités. Dans le domaine des avions légers, on peut citer, dès 1934, le C-480 Frégate et le C-510 Pélican, tous deux à aile haute et inspirés par des modèles anglais, le premier étant triplace et le second quadriplace (éventuellement transformable en avion sanitaire). Ils étaient équipés du fameux moteur Bengali de 140 ch. Le C-480 était le plus rapide (190 km/h en vitesse de croisière, contre 165 km/h pour le C-510). Comme tous les avions légers de l'époque, ils furent réquisitionnés à la veille de la guerre, et on ne compta pas moins de soixante-sept machines aux armées, dont vingt C-480; rappelons qu'il y eut également quelque quatre-vingt-cinq C-600, que nous étudierons plus loin, et plus de cinq cents Luciole de divers types, portant cocardes le 10 mai 1940. Apparu en mars 1935, le C-600 Aiglon était un élégant petit appareil de tourisme également conçu par l'équipe Riffard. Ce monoplan très fin, à aile basse et à train fixe, était un biplace en tandem équipé d'un moteur Renault Bengali Junior de 100 ch et pesant quelque 580 kg à vide. Construit à plus de cent exemplaires, il eut également un dérivé de raid, quelquefois désigné C-610, qui était une version monoplace à conduite intérieure, pouvant recevoir plus de 827 litres d'essence, ce qui lui conférait à 170 km/h une distance franchissable supérieure à 6 000 km. Le 30 novembre 1937, André Japy, « l'abonné de l'Orient », qui fut un grand utilisateur de cette machine, réussit à franchir près de 5 100 km en ligne droite, établissant ainsi un record mondial dans la catégorie. Le 13 mai 1938, Élisabeth Lion couvrit 4 063 km en ligne droite, battant ainsi le record féminin de distance en ligne droite toutes catégories; celui-ci fut d'ailleurs battu le surlendemain par Andrée Dupeyron (4 360 km). Sorti en juin 1935, le C-640 Typhon constituait la réponse de Georges Otfinovsky, de l'équipe Riffard, à la demande de Mermoz pour un bimoteur postal rapide. L'idée, cependant, ne fit pas son chemin, et les huit appareils produits furent destinés aux records, en version monoplace ou biplace. L'un d'entre eux fut vendu au célèbre pilote roumain le prince Cantacuzène, et désigné C-641. Les C-641 étaient des monoplaces capables, grâce à la grande capacité de leur réservoir, de franchir plus de 6 700 km (contre 3 725 km pour la version biplace). La version standard biplace, équipée de deux moteurs Renault 6Q-02/03 de 220 ch de puissance nominale, était un bimoteur élégant, aux lignes très pures. Malgré sa structure fragile, il permit au célèbre Rossi, le 24 avril 1936, de battre le record de vitesse sur 5 000 km sur le parcours 11stres-Bordeaux-Lyon-11stres. Rossi devait également l'engager, sans succès, dans la course 11stres-Damas-Paris. Une version militaire, désignée C-670, fut alors créée pour un programme mort-né de multiplace de combat. Avec un nouveau fuselage et des ailes renforcées de Typhon, cet avion apparut en mars 1937. Propulsé par deux moteurs Renault 6Q-02/03 développant chacun 220 ch à 4 000 m, il avait à cette altitude une vitesse de 400 km/h avec une charge utile de 1 017 kg. Son autonomie, au poids de 3 704 kg, était supérieure à huit heures à 330 km/h en croisière. Sa carrière tut brève. Dans le domaine militaire, la firme réalisa une série d'avions d'entraînement à grandes performances issue de la longue expérience des racers de la Coupe Deutsch. A l'automne de 1934, Riffard et Devlieger avaient créé le C-580, monoplace d'entraînement qui décolla pour la première fois en décembre 1934 piloté par Franco, adjoint de Delmotte depuis 1928. Équipé d'un moteur Renault Bengali Sport de 140/150 ch, l'avion avait une vitesse maximale de plus de 305 km/h au poids de 710 kg. C'était le premier appareil d'entraînement militaire doté d'une hélice à pas variable et de volets d'intrados, ce qui en faisait vraiment un avion moderne, capable de préparer les futurs pilotes de chasse à la conduite des avions à hautes performances. Néanmoins, jugé d'un pilotage trop:délicat, il ne fut pas retenu. Loin de renoncer, Riffard présenta dès le début de 1936 un autre avion à vocation identique, désigné C-720 et demandé par l'état-major, enfin conscient de la nécessité de disposer d'un appareil d'entraînement moderne. Caractérisé par une curieuse dérive elliptique issue du C-461 et du C-561, le C-720 prépara la venue du C-690, de lignes similaires, mais remotorisé avec un Renault 6Q-03 à compresseurs de 9,50 litres de cylindrée. Avec une envergure de 7,67 m et une surface portante de 9 m2, pour un poids total de 844 kg, il atteignait 370 km/h à 2 000 m, ce qui permit à Sarton du Jonchay, directeur des vols, d'effectuer une liaison rapide Paris-Bucarest, en 6 h 57 mn, le 24 mars 1936. C'est sur le prototype du C-690 que le célèbre pilote René Paulhan devait trouver la mort à Villacoublay le 10 mai 1937. Le second C-690 fut évalué et, après une longue mise au point, qui entraîna diverses modifications, il fut enfin commandé en série limitée. Dix-sept machines avaient été construites au 20 mai 1939, date à laquelle s'acheva la production. Tous ces appareils disparurent pendant la guerre, sauf un, oublié par l'occupant et qui vola probablement jusqu'au début des années cinquante. Ces avions d'entraînement militaire avaient ouvert la voie au C-870, créé par Georges Otfinovsky. Apparu à la fin de 1939, il répondait aux spécifications de l'état-major pour un avion de perfectionnement biplace à une époque où cette catégorie d'avions faisait cruellement défaut. Équipé d'un moteur Renault 12 R-09 de 360 ch, qui lui conférait une vitesse maximale estimée à 400 km/h, il était doté à l'origine d'un train escamotable, qui fut vite remplacé par un train fixe, jugé plus sûr en école. Commandé tardivement en grande série, il ne fut pas réalisé du fait de la guerre. Chasseurs légers Dans le domaine du monoplace de chasse, Riffard avait créé en 1936 le C-710, chasseur léger équipé d'un moteur Renault 112R-01 de 450 ch. Bien qu'il ait bénéficié de regains de faveur épisodiques, ce chasseur léger ne fut jamais au point, l'état-major ne disposant pas d'un équipement adapté à l'appareil.
simoun Pesant 1 645 kg en charge pour une surface portante de 12,50 m2, l'avion était peu chargé au mètre carré, mais très chargé au cheval-vapeur, ce qui limitait ses performances dans le domaine de la vitesse ascensionnelle. Le C-713, qui lui fit suite en décembre 1937, n'était qu'une version à train rentrant; il ouvrit cependant la voie au C-714 Cyclone. Gréé d'un moteur Renault 12R-03 développant 450 ch à 4 000 m et à 2 500 tr/mn, cet avion avait, à cette altitude, une vitesse de 487 km/h au poids de 1 736 kg. L'état-major fut intéressé par le Cyclone, qui avait le mérite d'employer un moteur disponible et de pouvoir être produit, en raison de sa construction en bois, en sous-traitance. 11l fut donc commandé en série en 1938 (vingt appareils en commande ferme, plus une option sur cent quatre-vingts), mais, par suite de diverses modifications apportées au contrat, seules quatre-vingt-trois machines furent produites, dont cinquante-six étaient terminées avant l'armistice. Avec l'équipement militaire standard, les performances de ces CR-714 Cl (à noter le sigle Caudron-Renault, enfin appliqué) étaient cependant inférieures à celles du prototype, leur vitesse étant tout juste supérieure à 455 km/h à 4 000 m, altitude atteinte en 9 mn 40 s, ce qui était insuffisant pour un chasseur. Ce fait, ajouté à une mise au point longue et difficile, leur valut d'être reversés dans les centres d'instruction de chasse de Lyon-Bron. Ils devinrent cependant opérationnels au sein du groupe de chasse 1/145, formé de Polonais venus en France continuer le combat. En attendant de pouvoir utiliser d'autres appareils, ces pilotes impatients purent, après de longs atermoiements, utiliser l'avion en opérations. Créé le 10 avril 1940, le groupe 1/145 fut affecté à la protection de la basse Seine, étant la seule unité à combattre sur ce type d'appareil. Celui-ci se révéla vite fragile, armé trop légèrement, mais néanmoins très maniable, ce qui permit aux Polonais de limiter les pertes au cours de leur brève carrière opérationnelle, qui dura du 2 au 13 juin 1940. Dans ce bref laps de temps, ces pilotes n'en revendiquèrent pas moins quatorze victoires, dont douze homologuées. Quelques appareils exportés en Finlande connurent une brève carrière au sein de l'Ilmavoïmat. Parallèlement au CR-714, la firme, en réponse à une spécification des services officiels, envoya en 1938 un dossier « chasseur léger » qui constitua l'expression finale de cette lignée de chasseurs. Ce furent le CR-760, le CR-770 et le CR-780 : les deux premiers furent produits fin 1939, mais ils arrivaient trop tard. Avec son moteur lsotta Fraschini de 760 ch, le CR-760 était capable d'atteindre 560 km/h à 5 000 m, altitude qu'il atteignait en 5 mn 25 s, alors que le CR-770 ne mettait que 4 mn 50 s pour arriver à cette même altitude, où sa vitesse frisait les 590 km/h avec un moteur Renault 626 de 850 ch. Dans le domaine plus spécifique de l'avion de record, les dernières réalisations de Riffard furent plus malheureuses. Ce fut d'abord la destruction du C-712, lancé à plus de 620 km/h pour le record de vitesse pure; ce fut ensuite le C-714 R à moteur Renault 12R de 900 ch et capable de voler à 720 km/h, mais qui arriva trop tard. Ce fut enfin l'étrange C-860 de 1938, conçu par Otfinovsky pour le pilote Japy. La production Caudron et Caudron-Renault fut donc incontestablement variée. Les pilotes d'essai de la maison Delmotte et Franco, aidés par Clément surent la rendre performante, tandis qu'Arnoux, Boucher, Bastié, Japy et Lacombe en faisaient la célébrité. Et quand en 1945-1946 le plan de concentration de l'industrie aéronautique fut adopté, la firme fut absorbée par la SNCAN; elle avait produit plus de 10 330 avions. René Caudron, avant de mourir, en 1959, vit ériger au Crotoy un monument consacrant le grand talent et l'oeuvre immense des frères Caudron. |
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