Films
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Films
Nous voici donc à Monaco pour l’ouverture du championnat 1966 mais surtout pour un grand moment de cinéma.
Calez-vous dans votre siège, pas de harnais à cette époque.., les images de la course restituées dans Grand Prix sont littéralement stupéfiantes, elles mêlent habilement la réalité et la fiction; le son n'est pas en reste, le bruit du V12 Ferrari (1) de la monoplace de Surtees avant le tunnel est d'une musicalité rare, certains diraient classique... Le large extrait publié à la fin de cette note permet de s'en faire une idée.
Le film nous fait découvrir le circuit et ses alentours, visite improbable au XXIème siècle où les images télévisées nous donnent à voir plus de rails que de décors. Ici au contraire on est admis dans des palaces prestigieux comme l’Hôtel de Paris ou encore l'Hôtel Hermitage qui se situent tous les deux au centre de l'action. En regardant attentivement certaines scènes, on peut distinguer le Christina O d'Aristote Onassis dans le port et une foultitude d'autres petits détails. Beaucoup de scènes sont filmées depuis un hélicoptère Alouette, pour une fois le public est traité comme un roi, pour la circonstance on dira "comme un prince".
Un autre vue encore plus surprenante nous permet d'admirer le "garage" de la production, installé sur le tracé de l'ancienne voie ferrée surplombant le virage du Portier. On y distingue notamment la Cobra Shelby mais aussi les fausses F1 préparées par Jim Russel et également les capots de la Ford GT40 du tournage.
Fort bien, mais venons-en aux faits, Aron a-t-il sciemment bloqué Stoddard, ou encore est-ce que Pete a délibérément choisi de ne pas tenir compte de l’injonction du directeur du team Jordan-BRM, injonction que l’on pourrait traduire par un « Scott is faster than you » ? Ou si la scène avait été tournée en 1989 à Suzuka, le casque d'Aron aurait-il été jaune ou plutôt bleu & blanc ?
Continuons sur ce thème. Vu sous un autre angle, ne s’agirait-il pas d’une version moderne du verset de la Genèse dans lequel Adam (Jeff Jordan) marque sa préférence envers Abel (Scott Stoddard) au détriment de Caïn (Pete Aron), conduisant ce dernier au (quasi) meurtre de son frère (coéquipier) ? Clin d’œil de l’histoire, il se trouve qu’Aaron est aussi le prénom d’un des deux fils d’Adam dans "A l’Est d’ Eden", sauf que dans le roman il représente cette fois Abel, à l'inverse du film de Frankenheimer.
Et ne venez pas me dire que tout ceci n’est que du cinéma, dans le monde des Grand Prix, on retrouve souvent ce même schéma. Il est vrai que le Team Jordan-BRM est plus à l’image du Team Lotus des années soixante que de l'écurie BRM, Jeff Jordan figurant même un Chapman assez crédible. Et personne n'ignore la manière dont ce dernier gérait ses premiers et seconds pilotes.
Il est temps de donner quelques explications à propos du scénario de Grand Prix. En 1963 sort un ouvrage intitulé The Cruel Sport, dont l’auteur est Robert Daley, journaliste correspondant du New York Times (2). Daley, ancien pilote de l'Air Force pendant la guerre de Corée, a découvert le sport automobile au moment de sa rencontre avec "Fon" de Portago (3). Il a ensuite suivi de très près les courses automobiles de la fin des 1950’s jusque vers le milieu des 1960’s. De cette expérience est tiré un livre culte, The Cruel Sport, dont quelques extraits sont accessibles sur internet.
Et l’on découvre alors que toute la trame de Grand Prix, ainsi que des dialogues entiers, est directement issue de l’ouvrage de Daley. Donc pour raccorder les scènes du film au livre, il est nécessaire d'opérer un décalage de quelques années en arrière, le caractère d’un Jean-Pierre Sarti pouvant s’approcher de celui d’un Phil Hill mixé avec un zeste de Trintignant ou de Von Trips, etc…
A l'issue de la course de Monaco, Sarti prend la tête du championnat avec 9 points, mais n'aura pas droit au podium princier. Seules quatre voitures finirent le vrai Grand Prix, qui durait 100 tours, dont une Ferrari et trois BRM de l'Owen Racing Organisation; ce qui constitue toujours un record. Les affichistes et les scénaristes avaient quand même bien anticipé le résultat.
Pour terminer, une anecdote tirée du livre "John Frankenheimer: Interviews, Essays, and Profiles"
... Frankenheimer réussit même à obtenir l’entière coopération d’Enzo Ferrari, qui autorisa l’équipe du film à utiliser ses voitures et ses techniciens, et à filmer à l’intérieur même de l’usine Ferrari. Lors des premiers contacts, Ferrari les avait pourtant envoyés sur les roses. Le producteur du film, Edward Lewis, apporta alors à Ferrari un vague extrait des séquences de Monaco et Enzo fut si enthousiaste qu’il apporta tout son soutien à partir de ce moment là. Quand on lui demanda combien cela couterait, Ferrari répondit, "Rien du tout. Ou bien je coopère avec vous, ou bien je ne le fais pas. Personne ne peut m’acheter."
Et enfin une dernière question :
- peux-tu me dire ce qu'est qu'un "Gazomètre", c'est un mot que je n'entends qu'une seule fois par an ?
... Frankenheimer réussit même à obtenir l’entière coopération d’Enzo Ferrari, qui autorisa l’équipe du film à utiliser ses voitures et ses techniciens, et à filmer à l’intérieur même de l’usine Ferrari. Lors des premiers contacts, Ferrari les avait pourtant envoyés sur les roses. Le producteur du film, Edward Lewis, apporta alors à Ferrari un vague extrait des séquences de Monaco et Enzo fut si enthousiaste qu’il apporta tout son soutien à partir de ce moment là. Quand on lui demanda combien cela couterait, Ferrari répondit, "Rien du tout. Ou bien je coopère avec vous, ou bien je ne le fais pas. Personne ne peut m’acheter."
Et enfin une dernière question :
- peux-tu me dire ce qu'est qu'un "Gazomètre", c'est un mot que je n'entends qu'une seule fois par an ?
(1) Lorenzo Bandini pilotant la Ferrari 246 V6.
(2) Robert Daley est aussi auteur de bestsellers comme Year of the Dragon ou Prince of the City. Sa biographie n’est pas l’objet de cette note, cependant on ne peut qu’inciter les lecteurs à découvrir cet auteur si ce n’est déjà fait.
(3) On peut à ce propos regretter qu’une Linda Christian - ex James Bond's girl et véritable bombe anatomique - n’ait pas trouvé sa place dans le casting.
Une petite vidéo du tournage...
Quelques photos:
Phil Hill, Jim Russell and Montand; possibly Bernard Cahier talking to the gent in the background.
Phil Hill perched on the GT40 at La Charade -
Phil Hill and (probably) Rindt at Monaco.
Garner in his TV reporter blazer at La Charade and Frankenheimer wearing the helmet Garner wore when he tried the 'Spinner' rig.
Dernière édition par scuderia57 le Dim 14 Sep - 17:46, édité 7 fois
Re: Films
pictures from Eagle comic, 1st October 1966.
Signature seen at the Goodwood Revival on the dashboard of the Lotus 20 which came third in the Formula Junior race:
Re: Films
Nous voici donc à Monaco pour l’ouverture du championnat 1966 mais surtout pour un grand moment de cinéma.
Calez-vous dans votre siège, pas de harnais à cette époque.., les images de la course restituées dans Grand Prix sont littéralement stupéfiantes, elles mêlent habilement la réalité et la fiction; le son n'est pas en reste, le bruit du V12 Ferrari (1) de la monoplace de Surtees avant le tunnel est d'une musicalité rare, certains diraient classique... Le large extrait publié à la fin de cette note permet de s'en faire une idée.
Le film nous fait découvrir le circuit et ses alentours, visite improbable au XXIème siècle où les images télévisées nous donnent à voir plus de rails que de décors. Ici au contraire on est admis dans des palaces prestigieux comme l’Hôtel de Paris ou encore l'Hôtel Hermitage qui se situent tous les deux au centre de l'action. En regardant attentivement certaines scènes, on peut distinguer le Christina O d'Aristote Onassis dans le port et une foultitude d'autres petits détails. Beaucoup de scènes sont filmées depuis un hélicoptère Alouette, pour une fois le public est traité comme un roi, pour la circonstance on dira "comme un prince".
Un autre vue encore plus surprenante nous permet d'admirer le "garage" de la production, installé sur le tracé de l'ancienne voie ferrée surplombant le virage du Portier. On y distingue notamment la Cobra Shelby mais aussi les fausses F1 préparées par Jim Russel et également les capots de la Ford GT40 du tournage.
Fort bien, mais venons-en aux faits, Aron a-t-il sciemment bloqué Stoddard, ou encore est-ce que Pete a délibérément choisi de ne pas tenir compte de l’injonction du directeur du team Jordan-BRM, injonction que l’on pourrait traduire par un « Scott is faster than you » ? Ou si la scène avait été tournée en 1989 à Suzuka, le casque d'Aron aurait-il été jaune ou plutôt bleu & blanc ?
Continuons sur ce thème. Vu sous un autre angle, ne s’agirait-il pas d’une version moderne du verset de la Genèse dans lequel Adam (Jeff Jordan) marque sa préférence envers Abel (Scott Stoddard) au détriment de Caïn (Pete Aron), conduisant ce dernier au (quasi) meurtre de son frère (coéquipier) ? Clin d’œil de l’histoire, il se trouve qu’Aaron est aussi le prénom d’un des deux fils d’Adam dans "A l’Est d’ Eden", sauf que dans le roman il représente cette fois Abel, à l'inverse du film de Frankenheimer.
Et ne venez pas me dire que tout ceci n’est que du cinéma, dans le monde des Grand Prix, on retrouve souvent ce même schéma. Il est vrai que le Team Jordan-BRM est plus à l’image du Team Lotus des années soixante que de l'écurie BRM, Jeff Jordan figurant même un Chapman assez crédible. Et personne n'ignore la manière dont ce dernier gérait ses premiers et seconds pilotes.
Il est temps de donner quelques explications à propos du scénario de Grand Prix. En 1963 sort un ouvrage intitulé The Cruel Sport, dont l’auteur est Robert Daley, journaliste correspondant du New York Times (2). Daley, ancien pilote de l'Air Force pendant la guerre de Corée, a découvert le sport automobile au moment de sa rencontre avec "Fon" de Portago (3). Il a ensuite suivi de très près les courses automobiles de la fin des 1950’s jusque vers le milieu des 1960’s. De cette expérience est tiré un livre culte, The Cruel Sport, dont quelques extraits sont accessibles sur internet.
Et l’on découvre alors que toute la trame de Grand Prix, ainsi que des dialogues entiers, est directement issue de l’ouvrage de Daley. Donc pour raccorder les scènes du film au livre, il est nécessaire d'opérer un décalage de quelques années en arrière, le caractère d’un Jean-Pierre Sarti pouvant s’approcher de celui d’un Phil Hill mixé avec un zeste de Trintignant ou de Von Trips, etc…
A l'issue de la course de Monaco, Sarti prend la tête du championnat avec 9 points, mais n'aura pas droit au podium princier. Seules quatre voitures finirent le vrai Grand Prix, qui durait 100 tours, dont une Ferrari et trois BRM de l'Owen Racing Organisation; ce qui constitue toujours un record. Les affichistes et les scénaristes avaient quand même bien anticipé le résultat.
Pour terminer, une anecdote tirée du livre "John Frankenheimer: Interviews, Essays, and Profiles"
... Frankenheimer réussit même à obtenir l’entière coopération d’Enzo Ferrari, qui autorisa l’équipe du film à utiliser ses voitures et ses techniciens, et à filmer à l’intérieur même de l’usine Ferrari. Lors des premiers contacts, Ferrari les avait pourtant envoyés sur les roses. Le producteur du film, Edward Lewis, apporta alors à Ferrari un vague extrait des séquences de Monaco et Enzo fut si enthousiaste qu’il apporta tout son soutien à partir de ce moment là. Quand on lui demanda combien cela couterait, Ferrari répondit, "Rien du tout. Ou bien je coopère avec vous, ou bien je ne le fais pas. Personne ne peut m’acheter."
Et enfin une dernière question :
- peux-tu me dire ce qu'est qu'un "Gazomètre", c'est un mot que je n'entends qu'une seule fois par an ?
... Frankenheimer réussit même à obtenir l’entière coopération d’Enzo Ferrari, qui autorisa l’équipe du film à utiliser ses voitures et ses techniciens, et à filmer à l’intérieur même de l’usine Ferrari. Lors des premiers contacts, Ferrari les avait pourtant envoyés sur les roses. Le producteur du film, Edward Lewis, apporta alors à Ferrari un vague extrait des séquences de Monaco et Enzo fut si enthousiaste qu’il apporta tout son soutien à partir de ce moment là. Quand on lui demanda combien cela couterait, Ferrari répondit, "Rien du tout. Ou bien je coopère avec vous, ou bien je ne le fais pas. Personne ne peut m’acheter."
Et enfin une dernière question :
- peux-tu me dire ce qu'est qu'un "Gazomètre", c'est un mot que je n'entends qu'une seule fois par an ?
(1) Lorenzo Bandini pilotant la Ferrari 246 V6.
(2) Robert Daley est aussi auteur de bestsellers comme Year of the Dragon ou Prince of the City. Sa biographie n’est pas l’objet de cette note, cependant on ne peut qu’inciter les lecteurs à découvrir cet auteur si ce n’est déjà fait.
(3) On peut à ce propos regretter qu’une Linda Christian - ex James Bond's girl et véritable bombe anatomique - n’ait pas trouvé sa place dans le casting.
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